Le dilemme de l’innovateur illustré par Kodak

Nath-Sakura narre avec brio l’histoire et surtout le déclin inexorable de Kodak.

Contrairement à la légende, l’échec du modèle industriel de Kodak n’est pas expliqué par le fait que Kodak n’ait pas compris l’importance de la nouvelle technologie disruptive qu’était la photographie numérique.

Paradoxalement, Kodak, leader mondial des boîtiers photo grand public et de la pellicule souple, est aussi la toute première entreprise à commercialiser en 1991 un appareil numérique : le Kodak Professional Digital Camera System (DCS) sur une base de Nikon F3.

Kodak, loin d’ignorer la technologie de la photographie numérique, n’a pas su résoudre le fameux dilemme de l’innovateur décrit par Clayton M. Christensen, Professeur d’administration des affaires à la Harvard Business School (HBS), connu pour sa théorie sur la technologie de rupture (disruptive innovation) introduite pour la première fois dans son livre The Innovator’s Dilemma

Kodak n’a pas voulu promouvoir le numérique de manière délibérée pour protéger son activité principale de l’époque, la vente de films argentiques. La meilleure preuve est que l’entreprise a d’abord essayé de forcer le numérique dans le moule traditionnel, en inventant le film numérique (APS). Un peu de manière suicidaire et alors que le déclin de l’argentique était déjà certain, Kodak s’est lancé dans un combat d’arrière-garde contre son principal concurrent de l’époque, Fujifilm, au détriment des investissements nécessaires en recherche et développement de la photo numérique.

L’Histoire des techniques montre que le progrès n’est pas linéaire et sans retour en arrière aucun (en réutilisant des « vieilles » technologies considérées un temps comme désuètes). Au niveau du marché de masse et dans le contexte d’un monde capitaliste planétaire, seule la photo numérique est adaptée (facilité d’édition et transmission instantanée par l’Internet dans un monde économique où il fait accélérer les échanges et surtout les monétiser tout au long de la chaîne et cela sans intervention humaine ( – c’est sans doute le but inavoué de l’IA : supprimer le travail humain qui est un frein dans l’accélération des échanges- ).

Mais la mémoire de l’Homme, son attachement au passé, fait que, parallèlement, des marchés de niches réapparaissent comme une forme de contestation… C’est le cas du retour en grâce de l’argentique… Et ce n’est pas l’affaire de « vieux cons » rabachant, sur un banc d’Ehpad : « C’était mieux avant ! » en tout cas, pas uniquement ! Retour en grâce aussi de l’impression comme marché de niche. Il est devenu tellement banal de publier ou communiquer une photo numérique que souvent elle ne sera même pas regardée… A contrario, offrir une photo papier à quelqu’un est un signe fort… On veut que cette photo soit régardée… On veut se gratifier… On veut faire plaisir à l’autre. C’est un marché de la gratification, de l’exclusivité, d’une certaine forme de rareté donc de luxe.

Dans les 2 cas, le but ultime est de monétiser au détriment des consommateurs et au seul profit de quelques uns… !

Ricardo Méndez

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