Les détracteurs du vieux flic alcoolique sont sans doute prêts à penser que celui-ci « roule » pour Nath-Sakura… en relayant certaines vidéos de sa chaîne Youtube… Méndez serait-il en pleine contradiction avec lui-même, lui qui ne cesse de clamer :
Ici, tout est libre, gratuit, sans pub et le restera !
Ricardo Méndez
Certes, même si Nath est entrée en guerre contre les influenceurs du monde de la photo qui inondent de vidéos serviles le canal Youtube, elle aussi fait du business, ne serait-ce que parce qu’elle promeut ses formations et ouvrages… Comment lui en vouloir d’ailleurs au vu de la haute qualité de ceux-ci ?
Mais Nath-Sakura nous fait avant tout partager son savoir, sa culture et ses connaissances immenses en Histoire de l’Art (en général) et de la Photographie (tout particulièrement).
Dans une de ses toutes dernières vidéos, de manière limpide, Nath nous explique le rôle du « processor image » (DSP comme Digital Signal Processor) de nos appareils photo numériques. Plus précisément, la photographe décortique les 7 principales étapes du fameux « pipeline image » (« pipeline » : voilà qui va parler aux informaticiens !). A un bout du pipeline, les signaux électriques en provenance du capteur. A l’autre bout, le fameux JPEG visible sur l’écran de votre appareil.
Bien entendu et comme toujours, Nath ne se limite pas au descriptif des différents étages du pipeline qui permettent la construction du fichier JPEG car elle est avant tout une militante… Elle explique comment les grands constructeurs d’appareils photos vont, à travers des algorithmes complexes, interpréter les signaux du capteur pour construire un JPEG flatteur susceptible de plaire à une cible-marketing… Encore et toujours du business !
Et comme d’habitude, Nath-Sakura répond en personne à tous les commentaires qu’ils émanent de photographes talentueux ou insignifiants comme l’auteur de ces lignes ! Ricardo la remercie encore pour sa longue réponse.
Ricardo Méndez, Officier de Police 2ème classe : @InspMendez
« Une de tes plus intéressantes vidéos !
Petite question : est-ce que l’application automatique des algorithmes des fabricants de boîtiers dans le but est de se démarquer de la concurrence, répondre à des choix marketing etc… ne va-t-elle pas AUSSI influer sur le matériel ?
Est-ce la fin des optiques qualitatives (et donc forcément très chères) au profit d’optiques moyennes voire médiocres dont on corrigera après coup les défauts à certaines étapes du pipeline image ? Est-ce là ce qui différenciera les optiques très haut de gamme qui supporteront un traitement manuel efficace (le développement d’un photographe-artiste) d’optiques à bas coût qui elles ne seront exploitables que par une certaine gamme de boîtiers produits par certains constructeurs qui auront passé des accords avec des opticiens (une forme de segmentation du marché imposée aux photographes consommateurs ? »
Nath-Sakura, Studio B612 : @NathSakuraChannel
« Tu mets le doigt sur le vrai nerf de la guerre.
Oui, mille fois oui : la logique marketing et logicielle finit par influencer le matériel lui-même.
Autrefois, une bonne optique devait corriger la lumière. Aujourd’hui, on se contente souvent de la corriger après coup. Les fabricants ont compris qu’un objectif plus léger, plus compact, un peu moins précis… coûterait moins cher à produire, et que le DSP (le processeur de traitement d’image) ferait le reste.
Résultat : beaucoup d’optiques modernes sont conçues en dialogue avec le pipeline. Leur distorsion, leur vignettage, leurs aberrations chromatiques ne sont plus vus comme des défauts optiques, mais comme des données à corriger. On ne cherche plus la perfection dans le verre, mais dans le code. C’est une bascule historique : la qualité perçue se déplace du cristal au silicium.
Tu as raison de parler de segmentation. Les gammes “pros” (Zeiss, G Master, L, APO, etc.) sont pensées pour résister à cette correction logicielle — pour offrir un signal brut riche, cohérent, que le photographe peut modeler. Mais les gammes “grand public”, elles, reposent de plus en plus sur le couple optique moyenne + pipeline agressif. Autrement dit : sans le firmware du constructeur, ces images seraient inexploitables.
C’est un cercle fermé : les constructeurs créent des optiques adaptées à leur pipeline, puis calibrent le pipeline pour ces optiques. Ce mariage technique, vendu comme un confort, devient une dépendance. Et derrière, oui, se cache une stratégie économique : t’enfermer dans un écosystème, comme un musicien obligé de racheter la même marque de pédales pour sa guitare.
Mais l’artiste, lui, n’a pas besoin de béquilles. Une bonne optique, c’est celle qui tient seule, sans algorithme pour lui sauver la mise. C’est celle dont le rendu ne dépend pas du firmware, mais du regard de celui qui déclenche.
Alors oui : le pipeline change la manière dont les objectifs sont conçus, testés, calibrés. Mais tant qu’il existera des photographes prêts à développer leurs RAW, à travailler leur lumière comme on polit une pierre précieuse, les bonnes optiques continueront d’exister. Parce qu’elles sont les instruments du regard — pas les outils du marketing. »
Jacques Ellul l’avait démontré il y a longtemps déjà dans son ouvrage « Le bluff technologique » édité en 1988 :
La technique n’est pas neutre.
Jacques Ellul
La vitesse est la forme d’extase dont la révolution technique a
Milan Kundera, La lenteur
fait cadeau à l’homme. Contrairement au motocycliste, le coureur
à pied est toujours présent dans son corps, obligé sans cesse de
penser à ses ampoules, à son essoufflement ; quand il court il sent
son poids, son âge, conscient plus que jamais de lui-même et du
temps de sa vie. Tout change quand l’homme délègue la faculté
de vitesse à une machine : dès lors, son propre corps se trouve
hors du jeu et il s’adonne à une vitesse qui est incorporelle,
immatérielle, vitesse pure, vitesse en elle-même, vitesse extase.
3 réponses à « Nath-Sakura nous rendrait-elle plus intelligent ? »
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Bel article !!!
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Merci beaucoup ! Il va y avoir une suite à cet article.
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Top !!!
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